Depuis quelques années, ceux qui ne jurent que par l’agriculture biologique et la permaculture parlent de plus en plus de « jardin syntropique » ou de « culture syntropique ». Mais qu’est-ce qui se cache derrière ce nouveau concept ? Si vous avez envie de le découvrir et, éventuellement, de l’appliquer à votre jardin, nous vous proposons de trouver quelques éléments de réponse dans cet article.
Syntropie
Origine du mot
Venant du grec, ce mot, qui est composé du préfixe « sún » signifiant « avec » ou « ensemble » et du mot « trópos » désignant la « tendance », est le contraire du terme « entropie ».
Si l’on se réfère au dictionnaire, l’entropie est un phénomè qui désigne un certain désordre, une manière de faire au hasard qui peut conduire à la destruction, ainsi le feu est un processus entropique, alors que la syntropie définit l’action convergente de divers facteurs pour arriver à une concentration d’énergie avec une organisation de plus en plus poussée et une complexification de plus en plus grande, comme cela se passe dans la nature lors de régénération des écosystèmes..
Origine du concept
Lorsque l’on parle d’agriculture syntropique, il est impossible de ne pas parler d’Ernst Götsch, l’agronome paysan suisse à qui l’on doit ce concept. Au début des années 1980, il s’est installé au Brésil dans une ferme où les terres avaient suivi un processus entropique et étaient devenues extrêmement arides et dégradées.
Pour résoudre ce problème et parvenir à cultiver ses terres, il a observé les écosystèmes naturels et plus particulièrement celui de la forêt, puis après avoir décidé d’appliquer le bilan de ses constatations à ses terres, il est parvenu, par un processus syntropique, à en faire des terres riches et productives en redonnant au sol les qualités nécessaires pour pouvoir le cultiver. Ainsi, en 30 ans, il a transformé un espace désertique en véritable oasis.
Pour ce faire, il a reproduit les différents stades présents dans la nature qu’il a accélérés grâce à l’intelligence humaine et a donné naissance à l’agriculture successionnelle ou syntropique. Face aux résultats, son concept et sa mise en pratique ont, dans un premier temps, enthousiasmé l’Amérique du sud, du fait de son climat tropical ou subtropical, puis progressivement, les agronomes du monde entier se sont intéressés à cette technique et ont, eux aussi, apporté des résultats intéressants.
Le principe de la syntropie dans la nature
Lorsqu’elle est livrée à elle-même, la nature tend à devenir une forêt en suivant trois étapes :
- Les plantes pionnières, comme les herbes, les mousses, etc., apparaissent dans un premier temps.
- Dans un deuxième temps, des plantes à croissance plus lente, comme des arbustes tels que des genêts, entre autres, leur font suite.
- Enfin, dans un troisième temps, les arbres prennent place et ce, pour un grand nombre d'années.
Ernst Götsch a attribué un nom à chacune de ces étapes : la première est la phase placenta, suivie de la phase secondaire et, enfin, de la phase climax. Chacune correspond à une strate de végétation.
Il faut également savoir qu’il existe trois stades d’évolution de la végétation.
- La colonisation, c’est-à-dire lorsque la vie s’installe même en milieu hostile.
- L'accumulation de biomasse, c’est-à-dire un système où beaucoup de bois et peu d’azote apparaissent. Cette accumulation permet de bénéficier de matières organiques au sol qui vont s’accumuler et se décomposer pour apporter des nutriments aux végétaux qui apporteront enfin de l’azote.
- L’optimisation de l’efficacité de la photosynthèse qui lorsqu’elle arrive à son maximum permet l’arrivée de végétaux à grandes feuilles et donc, d’herbivores qui vont venir perturber le système. Le cycle recommence alors avec une augmentation de la fertilité du milieu.
Le principe de syntropie appliqué à l’agriculture et aux jardins
L’agriculture syntropique va donc reposer sur la création d’un système de culture qui est à la fois complexe et dense. Cela veut dire que l’objectif est d’imiter les écosystèmes naturels, plus particulièrement celui des forêts, en installant des plantes différentes de manière rapprochée pour arriver à créer un équilibre entre elles. Cela passe par les étapes suivantes :
- L’organisation des cultures : Elle se fait d‘une part en différentes strates, à savoir des herbacées, des arbustes et une canopée, et, d’autre part, en associant des plantes qui ont des cycles complémentaires, c’est-à-dire des plantes annuelles, bisannuelles et vivaces. L’espace est ainsi optimisé et vous profitez d’une grande diversité biologique. De plus, cette organisation permettant une meilleure exploitation de la lumière et des ressources du sol, vous créez ainsi un habitat favorable à toute une variété d’espèces végétales, mais aussi animales. Concrètement, un jardinier peut créer une strate haute en plantant de la vigne et des tournesols, une strate arbustive avec de la lavande, du romarin, etc., une strate herbacée avec des plants potagers et une canopée avec des arbres fruitiers, et alterner ces strates pour créer un écosystème équilibré où l’espace est optimisé et où chaque plante favorise la santé des autres.
- La taille : Vient ensuite le temps de tailler les plantes pour stimuler leur croissance et, en même temps, accélérer la succession des végétaux. La taille contribue à ce que les plantes restent en croissance active et produisent abondamment.
- L’enrichissement du sol : Les déchets sont alors valorisés en les broyant pour les déposer au sol en mulch. Ces matières organiques viennent alors enrichir et fertiliser le sol tout en améliorant sa structure. En plus, le mulch permet de maintenir une certaine humidité au sol, ce qui réduit le besoin d’arrosage. En bref, vous créez un microclimat qui est propice à la croissance des plantes.
Les avantages de la culture syntropique et les problèmes
Les avantages
Ce type de culture est riche de nombreux atouts tant pour les jardiniers ou les agriculteurs que pour l’environnement :
- La syntropie appliquée aux jardins contribue à l’enrichissement du sol.
- Elle favorise l’augmentation de la biodiversité.
- Elle permet de limiter l’utilisation d’eau et d’engrais ou autres produits chimiques.
- Grâce à elle, les produits récoltés sont d’une qualité supérieure.
Les problèmes que la syntropie soulève
- La syntropie n’est pas possible sans une parfaite connaissance des besoins de chaque plante et des interactions entre les différents végétaux.
- Par rapport au climat, à la nature du sol, etc., la mise en place d’un système de ce genre peut demander du temps, de la patience et de multiples ajustements.
- Cette technique n’en est encore qu’au stade de l’expérimentation.
L’essor en France
En France, la syntropie se fait une place de choix, même si elle n’en est encore qu’au stade de l’expérimentation. Entre autres fermes, dont une dans le Périgord noir, une en Auvergne-Rhône-Alpes, etc., la ferme des Mawagits dans le Gers illustre bien l’intérêt pour cette méthode.
Dans cette ferme, 1 000 mètres carrés d’une parcelle dégradée ont été dédiés à ce type de culture. Grâce à ce type d'initiatives pionnières, il est possible d’en apprendre plus puisque ces lieux deviennent des espaces pédagogiques. Ici, on n’utilise pas de fertilisants chimiques, mais diverses espèces végétales pour montrer que la syntropie peut également être adaptée au contexte français.
Syntropie et permaculture
La permaculture, qui est déjà largement pratiquée, et la syntropie, qui est en voie de l’être, ont des points communs, mais aussi des points qui les différencient :
- Leurs points communs : Ces deux techniques misent sur la biodiversité et la durabilité. Dans les 2, les sols ne sont jamais laissés nus et les cycles naturels sont respectés. Toutes deux permettent d’accélérer par 10 le temps nécessaire aux processus naturels, de mieux exploiter la lumière du soleil et de garder un maximum d’humidité au cœur de l’écosystème.
- Leur différence : Si la permaculture peut faire entrer en jeu diverses méthodes et techniques, la syntropie mise presque uniquement sur la stratification de cultures denses. En fait, la syntropie peut être pratiquée en complémentarité de la permaculture.
Zoé, rédactrice passionnée par le jardinage et l'aménagement extérieur. À travers mes mots, je tente de transformer chaque coin de verdure en une histoire. Écrire, pour moi, c'est semer des graines d'inspiration.
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